Géographie humaine du maronage

Chapitre 4 - interprétation / ethno-linguistique

Carte des toponymes

liés au maronage
Carte des toponymes
liés au maronage

Cette carte regroupe les toponymes liés au maronage rencontrés dans les documents, toutes périodes confondues. La plupart sont d’origine malgache, ceux donnés par les marons. S’y ajoutent, en français, ceux donnés par les chasseurs de marons.

La vie des marons les pousse à une domestication et à une organisation de l’espace propices à une vie souvent itinérante, même si certains lieux comme l’Ilet à Cordes semble avoir pu regrouper trois générations de marons de manière pérenne d’après un rapport de détachement de 1752. La toponymie doit répondre à certains impératifs à forte valeur informative.
Ravitaillement
et vie quotidienne des marons
Lieux où la nourriture ou des accessoires de la vie courante sont accessibles et abondants.


Bémaho

aux nombreux mahos [arbres]

Il n’y a pas moins de 7 toponymes comprenant « maho ». Il faut dire que ses multiples usages rendaient cet arbre indispensable partout où il poussait mais surtout dans les hauts. Les jeunes pousses sont comestibles. Le bois servait à la construction et à la cuisine. L’écorce souple et résistante devenait cordes et cordages à volonté. Les fleurs roses ou blanches séchées devaient décorer délicatement coiffes et autres accessoires lors des occasions festives. On peut citer le toponyme guadeloupéen Baie Mahault qui semble être de la même origine.


Piton Songes

« Songe » se passe de commentaires quant à son rôle alimentaire. Mais à remarquer aussi sa valeur symbolique dans toute offrande végétale religieuse. C’est le « ravage » le tubercule par excellence dans le « vélas », rituel de présentation de mets pour les services des ancêtres.


Bébour

Aux nombreuses plantes « bora »

Contre les désordres digestifs.

Toponymes commémoratifs
de noms de chefs marons
Ces noms sont programmatiques, des noms de combat.


Caverne à Koute (Cotte)

Grand chef maron.


Feux à Manzak

Le « le roi » qui se servait de signaux pour rallier ses troupes, avec Reine Fouche « la reine blanche » [de teint ?].


Dimitile

Dimy-le-guetteur 

Capitaine sous le commandement
du roi Laverdure et de la reine Sarlave, responsable du renseignement
et de la sécurité.


Ilet Cimandal 

celui qui ne respecte pas, qui n’obéit pas

Toponyme proche de Cimandef. Ce dernier nom est le début d’une expression malgache « tsy mandefitra manana ny rariny » (celui qui ne plie pas, qui ne cède pas quand il est dans son bon droit).

Relatifs au sacré
ou à vocation spirituelle


Bras Massine

lieu sacré

Sanctuaire.


Ilet Bélou

lieu de carnage, massacre
qui laisse des rancunes

L’expression « qui laisse des rancunes » est importante. On va éviter ces lieux dans un premier temps et plus tard ils peuvent accueillir des cérémonies à visée « réparatrice » selon l’événement qui s’y est produit.


Bémassoune

emplie de soleil

Dans son sens littéral, et le lieu l’est certainement. Mais il s’agit surtout de caractériser un sanctuaire dédié aux « Vazimba », représentant les forces telluriques, chtoniennes.


Matarum

aux rochers, à la falaise des morts

Marque le respect ultime. Où que l’on se fasse assassiner, quelqu’en soient les circonstances, il y a un lieu consacré aux âmes.

Toponymes donnés
par les chasseurs de Marons


Bloc

lieu de rétention des esclaves après leur capture

Référencé quatre fois. Celui de L’Entre‑Deux est emblématique de ce toponyme : donné à une ravine très encaissée, large d’à peine dix mètres, bordée de remparts vertigineux.

Caverne Caron

Du nom d’un célèbre
chasseur de marons.


Piton Ambouèlam

chien-cochon sauvage 

Sobriquet injurieux et raciste donné au départ par le négrier arabe aux esclaves rebelles ressortissants des Hautes-Terres centrales malgaches, surtout aux Merina et accessoirement aux Betsileo.

Relatifs au système
de défense
des marons
Ils informent de dangers potentiels
et/ou participent au système défensif


Bélouve

aux nombreux pièges

Il s’agit, entre autre, de ces peiux à la pointe durcie au feu, enterrés à moitié, pour arrêter les chasseurs de marons dans les environs des camps.


Afène (Affine)

lieu à cacher

Pour raison stratégique, de défense ?


Apère

laissé

Déjà sûr, défendu ?

Ces deux derniers lieux fonctionnent en opposition, de même que l’autre ensemble : Mafate (qui tue) / Mahavel (qui fait vivre).


Ilet à Cordes

il s’agit d’un lieu accessible au moyen d’une corde qu’on remonte après son passage, et que la sentinelle jette à celui qui doit monter après un signal convenu. Cette pratique fut longtemps vivace dans les villages exposés aux négriers à Madagascar.

Illustration: Denis Vierge

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