Rapports de chasseurs de Marons

Chapitre 3 : approche historique / paléographie
Essentiellement conservées aux Archives départementales de La Réunion, les sources historiques liées au maronage et à sa répression se révèlent à travers une série de comptes-rendus, de procès-verbaux, de statistiques et d’articles de réglementation. Jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, ils sont le plus souvent manuscrits.  Ces documents doivent être retranscrits pour pouvoir être lus et compris aujourd’hui.

Les camps marons

Bien organisés, les camps sont situés dans des lieux difficiles d’accès, parfois défendus par des palissades et des pieux en bois. Les marons possèdent des chiens qui les alertent de toute présence suspecte. Certains camps possèdent jusqu’à une trentaine de cases construites en bois rond de bonne qualité. Les chasseurs y retrouvent les objets volés lors de razzia dans les habitations : nourriture, sel, blé, maïs, riz, haricots, volailles, cochons, même des bœufs et des chevaux dont la viande est débitée en quartier et boucanée avant d’être transportée dans les camps. Des armes à feu avec poudre et munitions ainsi que des armes blanches font partie des inventaires dressés par les chasseurs.

31 octobre 1751

Rapport de françois mussard,
officier de la milice bourgeoise et chef du détachement de chasseurs de marrons, au greffe du quartier Saint-Paul

Archives départementales, fonds Compagnie des Indes

— Il lui aurait répondu qu’il y avait deux camps de l’autre côté de l’ilette dans un desquels (et c’est précisément celui que le dit détachement avait aperçu et où ils allaient lorsqu’ils ont fait rencontre de ces trois noirs) il y aurait cinquante marons tant noirs que négresses ou enfants et que dans l’autre qui était plus petit et situé au dessus de celui-ci à la distance d’une lieue il y aurait dix marons tant noirs que négresses et enfants…

— Le dit Sieur Mussard sachant par une longue expérience que les marons cachent dans les cavernes et dans la terre ce qu’ils peuvent avoir de butin aurait fait chercher dans le dit camp et aux environs par les noirs suivant le détachement. Ils auraient trouvé dans une petite caverne deux fusils bien en état et chargés à balle et dans un trou d’un arbre un fusil à deux coups avec des balles et de la poudre environ trois quarterons dans une forme et onze marmite de fer de différentes grandeurs, plusieurs haches, serpes, pioches et lances de fer qu’ils ont emportés avec eux en fuite
— Déclare le dit Sieur Mussard en outre qu’ayant été joindre les six hommes qu’il avait détachés et étant entré dans le dit camp, il aurait aperçu dix-sept petites cases dont parties de bois rond et de 2 [?] autres de piquets de bouts ; qu’ils ont trouvé dans ce camp deux marmites une cafféière de cuivre des lances et des outils propres à […] des habitations. Déclare en outre le dit Sieur Mussard qu’ils ont vu autour des dits deux camps plusieurs petites habitations que les marons cultivaient et où ils plantaient des patates du perroux [sic], du maïs, des fagots de songe, le tout bien entretenu…

Les razzias

La « descente » sur les habitations est l’activité la plus spectaculaire des grands marons et la plus redoutée des habitants. C’est ainsi que les habitants, appellent la razzia ou le raid, rapide, brutal, destructeur et sanglant que les esclaves marons poussés par le besoin ou par le désir de représailles, effectuent sur les habitations ou propriétés agricoles. Ces incursions se déroulent de la même manière que les souvouc ou razzia malgaches en tous points conformes à ce que les habitants savaient des pratiques malgaches de la guerre.

28  mai 1742

Déclaration du sieur Dutrévoux
de plusieurs noirs qui ont été sur son habitation à la Rivière des Marsouins,
au greffe du Conseil Supérieur,

ADR C°963

En avril  1742, la descente de quelques soixante-dix marons sur l’habitation Dutrevoux, à la Rivière des Marsouins, est des plus spectaculaires. Après avoir mis le feu à la case, ils volent et enlèvent dans la maison principale comme dans celle de Pierre Pezé dit Coutance, commandeur de Dutrevoux :

« neuf cochons châtrés dont quatre gras […] et six autres moyens […] , faisant en tout le nombre de quinze, quarante deux chapons, trente-deux poules et environ trente poulets et deux coqs, neuf marmites de fer dont trois grandes et six moyennes, six cent livres de riz en paille, neuf grandes haches dont six neuves, seize grattes (houes) et seize pioches, dix serpes, trois scies à main, une herminette plate et une à gouge, un virrebrequin [sic], deux rabots, deux guillaumes, cinq ciseaux à charpentier, un compas de fer, deux tarières, une truelle et deux marteaux têtus, un gril, une poêle à frire, cinquante livres de sel du pays, quatre livres de cire jaune, une jarre pleine de graisse, huit assiettes, quatre plats et six cuillères d’étain fin, six fourchettes d’acier, six gobelets façon de cristal et six gobelets et leurs soucoupes de porcelaine, deux nappes et douze serviettes toile de France ; […] douze chemises blanches de toile de coton dont six jaunies, quatre habits : quatre vestes et six culottes de différents guingans, six chemises et six culottes longues de toile bleue fine, six paires de bas de coton, quinze piastres en argent, une paire de boucles de souliers et de jarretières d’argent, trois chapeaux de castor dont deux neufs, l’un bordé en argent, dix-huit carottes de tabac, une épée de cuivre à poignée d’argent au nommé Plusquelet, et un fusil demi-boucanier à Jean Briand ».

« Plus ont volé et emporté les hardes ci-après aux esclaves […] : à Suzanne : trois chemises et quatre mouchoirs et un pagne ; à Marion : quatre cottes de toile bleue, quatre mouchoirs dont deux rouges et deux bleus ; à Perrine : deux cottes et deux chemises de toile bleue et deux mouchoirs bleus ; à Marie, femme de Michel : deux chemises et deux mouchoirs bleus ; à Louise et René, son mari : quatre culottes et cinq chemises à homme, quatre à femme, plus cinq culottes, quatre mouchoirs et un couteau flamand, deux vestes de guingan et une pagne bleue [sic]; à Chiraffe : une chemise, une culotte, une pagne ; à Pierre : une chemise, une culotte ; à Michel : deux chemises, une culotte, une [sic] pagne ».

Au cours de cette descente, les marons brisèrent les outils de production deux meules dont ils emportèrent les morceaux, vingt-six bouteilles de gros verres, vingt-trois flacons à huile, et tuèrent « le cheval rouge » du commandeur. Dans la mêlée, trois des noirs privés furent blessés : Chiraffe et René, esclaves de l’habitation ainsi qu’un esclave appartenant à Cronier, venus pour porter du secours à la vue de l’incendie. Les marons emmenèrent avec eux deux esclaves de l’habitation Piment, un Malabar de 17 ans environ et Louise, femme malgache dudit René, qui réussit par la suite à leur échapper.

Récupérer des provisions, des vêtements, des outils, des armes, enlever des femmes et des hommes, n’était pas l’unique but des descentes. Les grands marons cherchaient aussi à terroriser les habitants, à se venger de leurs maîtres, de leurs commandeurs, en les atteignant dans leurs corps ou dans leurs biens en détruisant systématiquement les outils de production (scies-de-long, pilons à café, grandes meules et leurs manivelles, meules à maïs…).

Une fois leur raid achevé, les marons se regroupaient, généralement, à quelques distances de l’habitation ravagée, dans un espace dégagé, une clairière, afin de confectionner leurs paquets, partager le butin à la lueur de quelques chandelles ou flambeaux. C’était là une occupation dangereuse au cours de laquelle, ils furent souvent surpris par les détachements ou les noirs domestiques lancés à leur poursuite. S’ils avaient échappé à ce dernier danger, les assaillants, chargés de leurs paquets, regagnaient leur camp en veillant dans la mesure du possible à effacer leurs traces.

Pour être efficace, la razzia devait reposer sur le secret et la soudaineté de l’attaque ainsi que sur son impitoyable brutalité. Les groupes de grands-marons sont militairement organisés en tafichemanthi (tafika mainty), c’est-à-dire « armée noire ou secrète » avec réseau d’espions et guerriers-coureurs. L’irruption de « l’armée noire » dans les habitations devait tétaniser les habitants et les esclaves domestiques de Bourbon.

Leur but premier était de se procurer tout ce dont les marons avaient besoin pour vivre, en premier de la nourriture : du sel, du blé, du maïs, du riz, des haricots, mais surtout de la viande. Les marons enlevaient la volaille, poules et poussins, coqs, oies, dindons… volaient les cochons et quand l’occasion se présentait, dérobaient même des bœufs et des chevaux. On s’empressait de débiter ces derniers sur place ou à quelques lieues de l’habitation afin de pouvoir plus facilement transporter leur chair et la faire boucaner. C’est ainsi qu’en août 1746, Joseph Roulof accompagné de Jean, Pierre et Augustin Clin (Clain), à la poursuite de marons qui, depuis quelques temps, enlevaient les chevaux dans le quartier, trouva, dans les Bras de Liane, deux noirs et deux négresses dont Mathurin et sa femme, esclaves d’Edme Cerveau, qui étaient occupés à « boucaner » de la viande de cheval.

Les grands-marons recherchaient particulièrement les outils de charpentier et de menuisier pouvant servir à la construction des cases et des pirogues. Ils cherchaient aussi des outils agricoles, pour travailler leurs habitations ou plus simplement pour en priver leurs maîtres, des ustensiles de cuisines, et tout particulièrement les marmites, pour contenir et transporter leurs réserves, les assiettes et couverts d’étain dont, en les rognant, ils fabriquaient leurs balles de fusil ou de pistolet. Les marons cherchaient à se procurer des armes à feu, de la poudre, des munitions, mais aussi des armes blanches : baïonnettes, haches, serpes, sabres, couteaux, règles pour charger les fusils, des sagaies, particulièrement celles à pointes de fer qu’ils pouvaient difficilement forger. Ils emportaient aussi du linge de maison : draps, couvertures, serviettes, matelas, les hardes des noirs de l’habitation, les vêtements qu’ils dérobaient dans les coffres ou dont ils dépouillaient leurs victimes en les laissant nues. Ils faisaient aussi main basse sur les saisies et les sacs de vacoa où l’on mettait à sécher et conservait le café. Tout cela leur servait à lutter contre l’humidité et le froid des hauts, et à faire leurs paquets.

Les attaques de chasseurs

9 juin 1758

Rapport de Jean Duguain,
chef du détachement de chasseurs de marrons,
au greffe du quartier de Saint-Benoît

Archives départementales, fonds Compagnie des Indes

— […] qu’étant partis en détachement, dont le sieur Jean Duguain était chef, le trente et un du mois dernier à la poursuite des noirs marons, ils auraient battu le bois dans la plaine des Caffres et aux environs pendant l’espace de huit jours et qu’avant-hier sur les dix heures du matin, étant tous auprès de la rivière du Rempart, ils auraient aperçus deux noirs marons qui étaient à la chasse du cabris, auxquels ils auraient crié plusieurs fois Arrête là mais que les deux noirs au lieu d’obéir à ses ordres se seraient mis à fuir de toutes leurs forces ce qui aurait fait prendre le parti dans le champ au dit détachement de les poursuivre à toute outrance, le dit Mathurin Duguain et Joseph Le Beau s’étant trouvés plus à portée des deux noirs que le reste du détachement, ils auraient fait feu dessus, le coup de fusil du dit Mathieu Duguain ayant atteint un des dits noirs à la jambe droite qui a été percée de part en part et que par ce moyen il l’a pris, le coup de fusil de Joseph le Beau ayant porté […] les deux épaules de l’autre noir qui s’était trouvé sur les bords de la dite rivière des Remparts a trébuché dans un précipice, n’y ayant aucun endroit pour descendre…
— […] que si on voulait le suivre et lui promettre de ne pas lui faire de mal, il allait montrer l’endroit où étaient ces marons, ce qu’ayant accepté le dit détachement, ils l’avaient fait marcher devant eux, le dit Marc [Mai?] les ayant conduits près d’une caverne située dans le haut de la rivière du Rempart, ayant assuré que c’était là l’endroit où étaient ses camarades. Dans ce moment, plusieurs chiens des dits noirs marons s’étant mis à aboyer bien fort, le dit détachement s’est mis à courir pour tâcher d’investir tout de suite la dite caverne où il y a deux issues par où les noirs se sauvaient, ce que voyant,
le dit détachement après avoir crié plusieurs fois mais inutilement d’arrêter se serait mis à les poursuivre vivement et que plusieurs d’entre eux avaient fat capture, à savoir Jean Duguain aurait d’abord tué d’un coup de fusil une négresse malgache qu’il a reconnue ainsi que le reste du détachement pour être une nommée Marie, malgache appartenant à François Robert, fils de Pierre, dont il nous a présenté la main gauche, et qu’ensuite [il s’est] mis à poursuivre les autres…
— Germain Guichard a vu à la source une négresse malgache avec une petit négritte qui paraît âgée d’environ trois ou quatre mois enfant de la négresse qui dit appartenir à Pierre […], habitant du quartier Saint-Pierre, qu’elle est chrétienne, s’appelle Françoise, qu’il y a environ vingt ans qu’elle est partie marone, qu’avant de partir elle était mariée […] mais que depuis elle a changé de nom dans les bois et s’appellait Reine Fouche et était remariée avec le dit Manzac ; Mathurin Duguain ayant encore tiré après un autre noir qu’il a tué et dont il nous a présenté la main gauche, lequel a été reconnu par tout le dit détachement pour être le nommé Cotte, malgache appartenant aussi au dit François Robert…

Les sentences

Les procès verbaux des interrogatoires des marons capturés par les détachements et traduits en justice, nous renseignent sur les motivations des esclaves à « partir maron ». Les peines encourues sont prévues par le Code Noir et sont sévères. Elles sont exécutées en public à titre d’exemple pour frapper de terreur la population servile.

10 février 1736

Interrogatoire sur la sellette
du nommé Velsouava, esclave
appartenant à la Compagnie des Indes

Je requiers pour le Roy que les dits Philippe et Gilles pour avoir contrevenu aux arrêts du Conseil supérieur des 17 août et 30 novembre dernier et suivant iceux n’avoir gardé leurs bans, et pour s’être de nouveau enfuis soient condamnés à être pendus et étranglés jusqu’à ce que mort naturelle s’ensuive à une potence qui à cet effet sera dressée à la place accoutumée pour leurs corps morts y rester 24 heures et ensuite être portés aux fourches patibulaires. Que le dit Velsouava pour le marronnage par récidives et pour avoir aidé aux dits Philippe et Gilles à casser leur chaîne soit condamné à recevoir 100 coups de fouet par l’éxécuteur de la haute justice au pied de la potence et ensuite être flétri d’un fer chaud marqué d’une fleur de lys sur une épaule et assister à l’exécution des dits Philippe et Gilles. Je requiers de plus pour le Roy qu’il soit enjoint au greffier du conseil supérieur lorsqu’il prononcera aux esclaves des arrêts de condamnation à la chaîne à perpétuité, de faire lecture aux accusés de l’arrêt qu’il plaira au Conseil supérieur de rendre qui doit servir de règlement pour l’avenir pour la punition des esclaves qui ayant cassé leurs chaînes se seront enfuis, afin qu’ils n’en prétendent cause d’ignorance.

À Saint-Paul, Isle de Bourbon
le 10 février 1736


Archives départementales de La Réunion, archives judiciaires

15  OCTOBRE 1750

INTERROGATOIRE DE FRANÇOIS,
MALGACHE, ACCUSÉ DE MARRONNAGE

Le 15  octobre 1750, il est procédé en la chambre criminelle du Conseil supérieur à l’interrogatoire du nommé François malgache esclave de Jean-Baptiste Lebreton accusé de marronnage. Il a été quatre fois aux marrons, la première deux semaines, la seconde 20 jours, la troisième fois un mois et deux semaines. Il a été pris par son maître qui l’a fait passer au carcan et il a été fouetté. La quatrième et dernière fois, il a été marron quatre ans et deux semaines. Il a été pris par un détachement des habitants de la rivière d’Abord.

Il a été si souvent aux marrons parce qu’il était à travailler en bas à Saint-Paul à la case, que sa maîtresse le fouettait, c’est ce qui l’a fait aller aux marrons cette dernière fois. À cette occasion, il a emmené avec lui sa femme nommée Monique malgache, qui est encore dans le bois. Il n’a pas eu d’enfant avec sa femme et le bon Dieu n’a pas donné. Il n’a rien emporté qui appartienne à son maître. Seulement sa femme et lui ont emporté leurs hardes. Ils se sont retirés au pays Brûlé dans un boucan où ils ont fait un ajoupa. Ils y ont vécu de petits palmistes, fouquets et cabris marrons dont il y a beaucoup dans le bois. Ils n’ont rien volé à qui que ce soit et n’ont été dans aucune habitation. Il nie avoir volé du maïs et du riz dans les habitations. Ils n’ont pas vu la grande bande de noirs marrons, mais la petite bande, dont 13 mâles et 4 négresses. Ils ont demeuré ensemble toujours dans le même boucan au pays brûlé. Il les nomme tous.

Ne sait-il pas que l’on pend les Noirs qui vont aux marrons ? Il le sait bien, mais sa maîtresse est trop méchante et bat trop à lui. Ils n’avaient d’autres armes que deux sagaies, ils avaient des sagaies passées au feu.


Archives départementales de La Réunion, archives judiciaires

1er OCTOBRE 1751

INTERROGATOIRE 

Interrogé de son nom, âge, qualité et demeure, pays et religion. Il déclare d’appeler François, malgache, esclave d’Antoine Dalleau habitant de cette île, être âgé d’environ 25 ans et baptisé.

Pourquoi est-il détenu au bloc ?
— C’est pour avoir été dans le bois aux marrons.

Combien de fois a-t-il été aux marrons ?
— Il ya été trois fois, la première, pendant une semaine, la seconde, six jours, et la troisième encore six jours.

Pourquoi a-t-il été aux marrons ?
— C’est pour avoir été prendre du maïs sur l’habitation de sieur Pierre Huet.

N’a-t-il pas pris autre chose que du maïs ?
— Non.

Qu’a-t-il emporté de son maître lorsqu’il a été aux marrons ?
— Il n’a rien emporté.

De quoi a-t-il vécu dans le bois ?
— 
Il n’a vécu que de maïs, songes et cambares qu’il a emportés de l’habitation de son maître.

N’a-t-il point sollicité quelques noirs ou négresses, soit de son maître, ou autre habitant, pour aller avec lui dans le bois ?
— Non, il a toujours été seul.

Le conseil a condamné et condamne le nommé François malgache esclave appartenant à Antoine Dalleau, dûment et convaincu de s’être mal à propos et témérairement révolté contre les nommés Cupidon Noir malgache et Alexandre Noir créole de cette Isle tous deux esclaves à Jacques Pitou, qui voulaient l’arrêter étant marron, de s’être même servi contre eux d’un couteau flamand dont il les a blessés. Pour réparation de quoi l’a pareillement condamné à recevoir deux cents coups de fouet de la main de l’exécuteur de haute justice, en outre à porter à perpétuité une chaîne du poids de 40 livres chez son maître auquel il sera rendu et le présent arrêt notifié audit François Daleau afin qu’il aît à s’y conformer, à peine de 200 livres d’amende, même de plus grande peine si le cas y échoit.


Extrait du registre de marronnage du quartier de Sainte-Suzanne du 1er octobre 1751. Archives départementales de La Réunion, archives judiciaires

Les resistances et fuites

Les détachements de chasseurs trouvent régulièrement dans les camps des pirogues et des chaloupes creusées dans des troncs d’arbres. Certains marons tentent de rejoindre Madagascar par la mer. Des passeurs transportent depuis l’île de France (actuelle île Maurice) des marons qu’ils déposent à Bourbon.

24 août 1758

Rapport de Jean Duguain,
chef du détachement de chasseurs de marrons,
au greffe du quartier de Saint-Benoît

Archives départementales, fonds Compagnie des Indes

— […] lesquels nous ont dit qu’ayant tous sept formé un détachement sous le commandement du sieur Jean Duguain ils seraient partis du dix-sept août présent mois à la recherche et la poursuite de noirs marons et étant au pays brûlé à l’endroit appelé les deux bras, le vingt-deux du mois […] six heures du matin ayant aperçu des noirs qui faisaient une espèce de chaloupe d’environ vingt pieds de long sur douze pieds de largeur et six de hauteur…

— […] les dits Etienne Dumont, Mathurin Duguain et François Pitou, au dit fils du marquis auraient aussi pris vivants, savoir Etienne Dumont le nommé Diamda, François Pitou le nommé Diamite, tous deux malgaches tous deux appartenant au sieur de Croixmoy [?], et Mathurin Duguain le nom-mé L’Éveillé au sieur Jean-Baptiste Le Breton du quartier Saint-Paul, lesquels cinq noirs pris là-bas faisant partie du nombre de six et sept qui composaient un camp à environ deux cents gaulettes de l’endroit où ils étaient à construire la dite chaloupe…
Illustrations © Denis Vierge / Des Bulles dans l’océan

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